« Bibliomanies » Collectif. Anthologie. Ivres de Livres, libraire-éditeur, 2011
« Ivres de Livres », libraire-éditeur à Strasbourg, nous offre, avec « Bibliomanies », une passionnante anthologie sur le thème de cette pathologie que l’on nomme bibliomanie ou encore bibliolâtrie.
On y verra que cette curieuse maladie faisait déjà parler d’elle dès l’Antiquité et fut brocardée par des auteurs aussi illustres que Sénèque et Lucien de Samosate.
Plus tard, au Moyen-Âge, c’est le poète Pétrarque qui tourne en ridicule ces vaniteux bibliomanes qui pensent qu’accumuler chez eux un nombre incalculable de livres leur donnera une aura de sapience et de respectabilité : « Assurément, si l’abondance de livres faisait des savants ou des gens de bien, les plus riches seraient les plus savants de tous et les meilleurs, tandis que nous voyons souvent le contraire. »
Mais c’est après l’invention de l’imprimerie et la propagation à grande échelle des écrits que commence l’âge d’or des bibliomanes. Après les vaniteux cités plus haut, vont arriver les collectionneurs qui seraient prêts à tuer père et mère ou à s’amputer d’un bras pour acquérir une édition rare ou compléter leur collection regroupant tout ce qui a pu être édité sur tel auteur ou tel sujet, quel qu’il soit.
L’anthologie ici proposée fait la part belle à ces bibliophiles avec, entre autres, « Le Bibliomane » de Charles Nodier, « L’Enfer du bibliophile » de Charles Asselineau, sans oublier le célèbre « Bibliomanie » de Gustave Flaubert.
Il est regrettable de constater, à la lecture de cet ouvrage et au travers des écrits des onze auteurs qui le composent, que pas un seul de ces bibliomanes, bibliophiles et bibliolâtres ne s’intéressent à ce qui est contenu dans leurs « chers » livres. La curiosité, l’envie d’apprendre, l’amour de la littérature et des belles-lettres sont en effet complètement étrangers à ces individus. Leur frénésie compulsive est motivée par l’ambition, la soif du « paraître », l’appât du gain motivé par la rareté et la cherté des ouvrages convoités.
Ce que renferment ces livres n’a finalement pour eux que peu d’importance comparé à leur valeur marchande et au prestige que peut acquérir leur possesseur. Ces personnages sont à mettre au même niveau que ces collectionneurs de toiles de maître qui acquièrent pour des sommes faramineuses des œuvres d’art qui, une fois en leur possession, végeteront dans un coffre-fort en attendant d’être revendues lorsque les coûts du marché de l’art permettront de réaliser un bénéfice substantiel.
Ainsi, ces bibliomanes qui aiment à se targuer du nombre colossal d’ouvrages en leur possession, de leur rareté et de leur valeur, ne sont finalement que des collectionneurs comme les autres, mais qui, malheureusement, sont loin d’être aussi modestes qu’un philatéliste ou un collectionneur de capsules de bières.
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