Nicolas Rieucau
Voltaire & le livre. Textes réunis par François Bessire et Françoise Tilkin, Ferney-Voltaire, Centre international d’étude du XVIIIe siècle, 2009, 326 p.
Texte intégral en libre accès disponible depuis le 15 janvier 2011.
Bien que le Siècle des Lumières soit marqué, selon les historiens de l’édition, par le « triomphe du livre », on sait que la reconnaissance légale de l’état et de la figure tant de l’auteur que de l’éditeur tarda à s’imposer. Par l’affirmation de son statut d’écrivain autonome et la maîtrise qu’il tentera d’exercer sur les rouages de l’édition, Voltaire offre dans ce contexte une image tout à fait singulière.C’est dire si la publication, légèrement enrichie, des actes du colloque « Voltaire & le livre » organisé à la Bibliothèque nationale de France par la Société Voltaire en 2005 est aujourd’hui bienvenue. L’ouvrage se décompose en trois parties, dont les intitulés sont les suivants : I « Voltaire et le monde du livre », II « Circulation et réception du livre voltairien », III « De la lecture à l’écriture ».
La partie évoquant notamment l’acte de naissance du livre voltairien et le traitement à proprement parler physique que ce dernier lui impose se trouve ainsi paradoxalement située au terme de ce recueil, peut-être en raison du faible nombre de pages qui lui sont relatives – 59 pages, tandis que la première et la deuxième parties en occupent respectivement 146 et 84. C’est en effet à partir d’un des constats qui en émanent que plusieurs enseignements généraux nous semblent devoir être présentés.
Ce constat réside dans le fait que Voltaire ne s’attache pas au livre en tant qu’objet matériel,comme le révèle l’étude relatant le témoignage deWagnière (p. 243-256) et celle décrivant le rapport « charnel » que son maître entretient avec le livre (p. 271-277). La lecture voltairienne laisse physiquement des traces : cornes, marques muettes, marginalia, signets parsèment les pages des livres de la bibliothèque du Patriarche.Voltaire malmène ses propres ouvrages, comme ceux de ses prédécesseurs ou de ses contemporains. Le livre est de la sorte réduit, chez lui, au rang de simple outil de travail, en somme du strict point de vue de sa valeur intellectuelle. L’oeuvre voltairienne, qu’il s’agisse d’ouvrages imprimés ou de manuscrits, est dans cette perspective constellée de corrections, parfois rédigées à des époques différentes.
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