« Le bibliothécaire est un peu le forestier du livre » Alain Pierrot et Jean Sarzana, 2010
Posted by memoire2silence under Livre et numérique
« D’ordinaire, en regardant bien le circuit du livre, on peut apercevoir le bibliothécaire au fond du corridor. Il est presque toujours cité le dernier, on sait qu’il est incontournable, mais comme il ne participe pas du marché – c’est un agent public, il conserve et il prête, il achète si peu – il n’est jamais au coeur des discussions d’actualité sur la marche du monde. Pourtant, il occupe une place à part dans la saga du livre – il est né avec lui, bien avant le codex, bien avant l’édition – et il a puisamment marqué son histoire. S’il ne vit pas au rythme incertain du marché, il accompagne la vie du livre sur la longue durée et sait prendre la mesure du fonds et de sa densité. A côté de sa mission patrimoniale de conservation, sa fonction le requiert d’assurer l’observation permanente et suivie des ouvrages. Le bibliothécaire est un peu le forestier du livre, il vit et raisonne à long terme et dans les deux sens, il se voit comme le dernier rempart. On a le sentiment qu’une muraille de Chine sépare éditeurs et bibliothécaires. Ils gagneraient à la changer pour un paravent japonais. » (page 26)
Comment ne pas être fasciné à la pensée d’être contemporain d’une de ces très rares mutations essentielles de l’écrit, aussi violente et profonde que celle du passage du rouleau au codex, avec son lot d’imprédictible ? écrit François Bon dans sa présentation du livre Impressions numériques d’Alain Pierrot et Jean Sarzana, publié sur la coopérative d’auteurs : Publie.net. Allez, soyons un peu polémiques : on est fatigué de ces discours à la gloire seulement de l’argent et de l’industrie. C’est de civilisation qu’il s’agit. Et d’un paradoxe qui rend l’affaire complexe : il y a beau temps que le livre traditionnel est déjà affaire numérique, de bout en bout. Et dans le bouleversement actuel, les lignes de force et de partage rejouent des conflits culturels qui n’ont rien à voir avec la seule question du numérique.
Lire la suite :