La lutte pour emporter les marchés du livre numérique ressemble bizarrement à un champ de bataille sans soldats : les enjeux sont énormes, mais, pour l’instant, les liseuses (et donc la pénétration du livre numérique) restent un produit marginal, quoi qu’en disent les enthousiastes. Bien sûr, c’est aujourd’hui que l’on façonne les marchés et les habitudes de demain, mais il y a un petit côté surréaliste à voir d’un côté le bouillonnement d’activité et d’innovation qui se joue entre les éditeurs, l’urgence qu’on lit dans les discours, les intitiatives des enthousiastes, et de l’autre l’air un peu abasourdi du grand public qui se dit, en substance et en majorité, WTF.
Ce qui ne veut évidemment pas dire qu’il ne faut rien faire.
La transition s’opérait doucement, avec des éditeurs purement numériques apparus sur le Net, des balbutiements un peu hésitants côté grande édition (avec des livres électroniques au prix du grand format et verrouillés de partout), des modèles de financement qui se cherchent encore (il paraîtrait raisonnable, quand on connaît l’économie de la chaîne du livre, que l’auteur touche en numérique davantage que les habituels 10 % du prix de vente papier). Prix et verrouillage vouent selon toute logique la publication électronique à l’échec (et la question de la rémunération suscite un mécontentement général).
Car le public :
- Veut posséder le fichier qui’ll a légalement acheté. Voir une nouvelle tentative d’application de verrous (DRM) sur les contenus numériques est passablement navrant. Les DRM compliquent la vie du consommateur légal, qui se trouve fréquemment dans l’impossibilité de jouir convenablement de son achat, quand le pirate est libre de tous les écrans d’avertissement et autres méthodes de traçage, sans parler de la liberté du choix du terminal (interopérabilité). Les DRM font la guerre au consommateur légal. Il va bien falloir comprendre ça un jour. Bord**.
- Refuse de payer plus cher, ou marginalement moins cher pour un livre électronique qu’un livre papier. L’édition avance que les frais de production restent globalement les mêmes (retravail du texte, composition) même si les postes imprimerie et distribution sautent. Le problème est que le grand public a en tête le modèle du livre de poche et que celui-ci est mis à pied d’égalité avec le livre électronique.
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