Des Eclairs
Jean Échenoz
Éditions de Minuit, 176 pages, 14,50 €. Parution le 23 septembre.
Choix de Wilfrid Sejeau de la librairie Le Cyprès à Nevers (58)
Gregor est né une nuit d’orage, de tempête, toute temporalité abolie, ne sachant si sa venue au monde est intervenue avant ou après minuit. L’électricité, la foudre, le dénombrement compteront dans ses obsessions tout au long de sa vie. Après Ravel et Zatopek, Echenoz raconte une troisième vie plus ou moins imaginaire, celle du scientifique Nikola Tesla, prénommé ici Gregor, inventeur génial, mégalo, irascible, du courant alternatif, du radar, de la radio, entre autres. Un homme maniaque, comme possédé, perpétuellement en proie à une rage créatrice, déposant des brevets à tour de bras, menant grand train, mondain assuré de sa valeur, terriblement vaniteux qui accumule toutefois, tout au long de sa vie, les erreurs, les mauvais choix, les succès colossaux et les déconvenues abyssales. Un scientifique donc mais aussi un homme de salon, un bretteur, un bonimenteur. En réalité, un homme tragiquement seul, si l’on ne tient pas compte de ses amis les pigeons, qui se refuse à tout contact physique, autant par hygiénisme que par inappétence totale.
Pourtant, dans un style vif et sec, souvent burlesque, Echenoz rend ce personnage terriblement attachant, finalement très humain, nous passionne avec ses frasques et ses lubies, plonge dans un vingtième siècle balbutiant tout enivré de découvertes et de progrès scientifique.