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Choix du jour de libraires à Perpignan (66) et Lesneven (29)

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La carte et le territoire

Michel Houellebecq

Genre : Romans et nouvelles – français

Flammarion

22.00 €

ISBN : 9782081246331

GENCOD : 9782081246331

Sortie le : 08/09/2010

 

Choix de Laurent Lebourg de la librairie Privat Chapitre à Perpignan (66)

Un artiste contemporain d’un naturel calme, ne se prenant pas au sérieux et poursuivant son chemin sans prendre en otage son public, ni lui imposer sa vision du monde. Une créature purement littéraire qui n’appartiendrait qu’à l’univers de Michel Houellebecq ? On aimerait pourtant en rencontrer plus souvent !

Dans son dernier roman, l’auteur des Particules élémentaires ose franchir le cap qui sépare la réalité de la fiction. Il mêle des personnages fictifs comme l’artiste Jed et d’autres bien réels tels que Beigbeder, Jean-Pierre Pernaut, et surtout lui-même ! Peu d’écrivains traversent cette frontière littéraire, car la polémique médiatique et les procès abusifs sont souvent en embuscade. Qui oserait – sinon lui – dresser le portrait des icônes tendances comme Jeff Koons et Damien Hirst, cet Éros et ce Thanatos se partageant le marché de l’art contemporain ?

Dans La carte et le territoire, le lecteur retrouvera ce fameux coup de pinceau qui avait valu à Michel Houellebecq ses premiers succès. Ses talents de romancier-sociologue sont donc de retour. Sa recette est simple : il nous dévoile le quotidien tel qu’il est, sans retouche, prenant au contraire le parti d’en enlever les paillettes factices, tout en évitant le piège de déraper dans le sordide.

Le résultat : Un tableau réaliste de notre société où l’amertume et la lucidité se partagent le territoire. Relevons cette scène du repas de noël : L’artiste dîne en tête à tête avec son père. Le silence et la solitude sont oppressants. L’ambiance glauque du restaurant est si bien rendue qu’elle nous évoque inévitablement les toiles désenchantées d’Edward Hopper.

Le quotidien, l’ordinaire : c’est de la matière première sous-exploitée pour le romancier d’aujourd’hui. Houellebecq s’en empare avec une aisance déconcertante.

C’est probablement là que réside la quintessence de son talent. En voilà un auteur fascinant : il arrive à nous captiver en parlant durant quelques pages d’un vieux radiateur en fonte !

Étonnant funambule des lettres : vers le milieu du livre, il s’offre le luxe d’une virée soudaine dans le roman noir ! Caprice d’écrivain gâté qui saborde son bel ouvrage ? D’abord surpris, le lecteur est rapidement conquis par cette rupture des codes littéraires, car son style semble s’accommoder de toutes les extravagances. Peut-on d’ailleurs citer un auteur possédant un degré tel d’autodérision, au point de se mettre en scène en écrivain négligé, se faisant assassiner, puis effectuant son dernier voyage dans un cercueil d’enfant ?

Glauque, sans espoir, degré absolu du nihilisme littéraire ? Son inimitable ton ironique et décalé n’arrive cependant pas à couvrir un certain sentiment de malaise. C’est le signe qu’il a rempli sa mission : le Houellebecq miroir de la société a fonctionné à merveille. Laissons le mot de la fin à Stendhal :

«Un roman est un miroir qui se promène sur une grande route. Tantôt il reflète à vos yeux l’azur des cieux, tantôt la fange des bourbiers de la route. Et l’homme qui porte le miroir dans sa hotte sera par vous accusé… d’être immoral ! Son miroir montre la fange, et vous accusez le miroir ! Accusez bien plutôt le grand chemin où est le bourbier, et plus encore l’inspecteur des routes qui laisse l’eau croupir et le bourbier se former.»

Deux siècles séparent Houellebecq de Stendhal, et pourtant cette citation se prête à merveille à l’auteur de La carte et le territoire. Reste à savoir si les critiques sauront différencier le miroir de l’homme ?

Choix de Jean-François Delapré de la librairie Saint-Christophe à Lesneven (29)

Que faire quand on est devant le meilleur Houellebecq ? Simplement s’incliner. Ce bon vieux Michel (il semble si vieux dans le livre !) a eu cette idée aussi sotte que grenue de s’inviter en guest star dans son propre livre. Cela aurait pu être hors de propos et ici non. Pourquoi ? Parce qu’il a cette lucidité exacerbée de l’auteur qui se fout de tout… Et il a bien raison. Alors me direz-vous, de quoi parle ce livre ? Un peu de tout, de l’art et de Jean-Pierre Pernaut, cela ne vous suffit pas. Cela devrait ! ! ! Encore une fois, Houellebecq nous tire une magnifique révérence sur ce qu’est écrire, sur ce qu’est un écrivain, un véritable, avec une distanciation vis-à-vis de sa propre écriture et c’est un magnifique et grandiose coup de pied au cul des convenances. Rien que pour ça, merci Michel ! ! !

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